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Ines Goutenmacher, 2002 | Villars-sur-Glâne, FR

 

Ce travail de recherche retrace le vécu de deux familles juives, l’une de classe bourgeoise et l’autre de classe modeste, dont les destins se croisent durant la Seconde Guerre mondiale. Voyageant de l’Empire russe à la France, en passant par les prisons allemandes, les camps polonais ainsi que les terres d’Israël, les Goutenmacher et les Kahan font face à une dure réalité historique. Ce récit met en avant leur expérience de l’Holocauste tout en contribuant à une mémoire familiale, les protagonistes étant mes aïeux.

Problématique

L’objectif est de traiter l’Histoire à travers la découverte de ses propres ancêtres. Il s’agit de comprendre comment deux familles ont vécu l’antisémitisme, en particulier dans le cadre du régime de Vichy. La pertinence d’aborder ce sujet avec une telle approche réside dans la volonté de générer une prise de conscience. Ainsi, il est possible de faciliter le combat contre l’animosité à l’égard des juifs qui persiste encore de nos jours.

Méthodologie

Ce mémoire s’appuie principalement sur des sources orales. Les témoins sont des membres de la famille aujourd’hui dispersés en Europe et en Asie. Leurs connaissances ont permis d’étoffer le contenu du récit par la confidence d’anecdotes et de souvenirs. Afin de s’approcher de la réalité historique, il a fallu comparer les différentes versions des événements et procéder à une sélection. La récolte des sources s’est faite aussi bien au sein des archives familiales que dans des institutions publiques françaises ou encore via des sites internet spécialisés. Quant à la manière de disposer le tout, de l’inspiration a été puisée dans des ouvrages narratifs.

Résultats

Les résultats obtenus démontrent comment l’expérience des personnages s’inscrit dans les questions globales de l’époque. L’origine du nom « Goutenmacher » enseigne la façon dont les noms juifs se sont formés sous le règne de Catherine II. L’émigration met en lumière les conséquences liées aux pogroms au début du XXe siècle. Suite à la défaite de l’armée française à Dunkerque, Raymond Goutenmacher déserte. L’audace de laisser son régiment derrière soi, puis la ruse de se cacher peuvent ainsi valoir la survie. André Goutenmacher est détenu dans un stalag allemand. Cela révèle qu’il y a aussi des prisonniers de guerre juifs, même cantonnés séparément des autres. Olga et Micheline Kahan sont embarquées en direction d’Auschwitz. Une lettre rédigée dans le convoi témoigne des conditions de transit atroces. Léon Kahan, interné à Drancy, écrit des confessions. On découvre ainsi qu’il est possible de communiquer depuis un camp de travail. Fuyant vers la zone libre, Noémie Kahan quitte son appartement à Paris, que les nazis réquisitionnent. Grâce à ce sacrifice, elle échappe à l’arrestation. Poussé par le désarroi, Roger Kahan se réfugie en Israël. Cet acte dévoile le profond besoin des victimes de s’affranchir du fléau qu’est la guerre. Malgré la perte d’êtres chers, les survivants parviennent à se reconstruire. Les Goutenmacher connaissent un essor financier remarquable durant les Trente Glorieuses.

Discussion

Si convoité par mes aînés, ce projet a été mené à bien. Les objectifs de départ ont été atteints, et surpassés. En explorant les aventures de mes aïeux, mon savoir en histoire s’est nettement élargi. Les épreuves que les deux familles ont dû traverser m’ont également stupéfaite. Avant cela, je ne connaissais que leur appartenance religieuse et l’existence de quelques écueils durant la Seconde Guerre mondiale, sans imaginer l’ampleur du contexte historique. La mosaïque d’émotions a réussi à toucher les lecteurs ainsi qu’à les sensibiliser à la cause juive. A ces satisfactions s’ajoute un effet inattendu : j’ai tissé des liens avec ma famille lointaine. Cette trace écrite est désormais une nouvelle pierre qui charpente l’édifice de la Shoah.

Conclusions

Ce mémoire relate une histoire dramatique, mais qui trahit des lueurs d’espoir. La gestion de situations imprévues sert définitivement de leçon de vie. Un précieux puzzle a pu être reconstitué et sera transmis aux générations suivantes. Seule la recherche d’un élément n’a pas pu aboutir : un texte au sujet de la Liberté, écrit par Maurice Goutenmacher. Il renferme un message symbolique que la Bibliothèque Nationale de France a publié. Celle-ci n’a malheureusement pas été en mesure de me la procurer. Néanmoins, le devoir de mémoire est accompli. J’ai rendu hommage à mes aïeux, et j’en ai énormément appris sur le passé collectif et familial, et par conséquent sur mes propres racines.

 

 

Appréciation de l’expert

Yves Collaud

Mme Goutenmacher reconstitue la trajectoire de sa famille depuis la Russie du XIXe jusqu’à nos jours, avec une attention sur le régime de Vichy et ses conséquences. L’autrice utilise principalement des interviews qui sont mis en perspectives à l’aide des archives familiales et publiques. Le travail de Mme Goutenmacher offre une compréhension par le bas, l’expérience d’une famille, de ce qu’impliquent les politiques antisémites et l’Holocauste pour les acteurs et actrices de l’époque. L’autrice décrit avec précision et empathie les choix que purent faire les membres de sa famille.

Mention:

bien

 

 

 

Kollegium Gambach, Fribourg
Enseignant: Claude Bays