Histoire | Géographie | Économie | Société

 

Giulia Tognola, 2002 | Fribourg, FR

 

La notion de frontière peut sembler simple à appréhender, cependant la polysémie de cette notion la rend abordable sous différents angles. Ce travail propose d’analyser la frontière italo-suisse sous une approche socio-historique répondant à l’interrogation quant à la nécessité de matérialiser une frontière pour lui donner une fonction de séparation. Grâce à une analyse comparative de deux étapes de la frontière: une dans l’entre-deux guerre et l’autre dans la période actuelle, le travail met en évidence que la frontière assure une fonction de séparation principalement à travers les mythes et symboles qu’elle matérialise.

Problématique

Par ce travail, j’ai tenté de répondre à la question de la matérialisation des frontières. En effet, aujourd’hui, on pourrait avoir l’impression que les frontières ont tendance à disparaître du fait de la mondialisation. La recherche s’appuie sur un aspect passé et actuel de cette question. Les murs et barbelés ont-ils besoin d’être construits ou ne sont-ils pas déjà présents dans nos têtes? Pour répondre à cette question, je me suis focalisée sur «la Ramina», barbelé qui fut construit sur la frontière italo-suisse au début du 20ème siècle. Mais aussi sur le phénomène actuel du frontiérisme entre la Lombardie et le Tessin.

Méthodologie

La partie du travail sur la Ramina se base sur des faits historiques tirés de plusieurs sources bibliographiques sur la visite du «Musée National des Douanes» à Gandria (TI). Puis, j’ai contacté un expert en la matière, Walter Leimgruber, qui a répondu à certaines de mes questions. Et, finalement, un entretien avec mon grand-père a été très enrichissant. Le croisement des sources est très bénéfique dans cette partie du travail. La partie du travail sur le phénomène des frontaliers s’appuie quant à elle essentiellement sur des sources bibliographiques et des chiffres.

Résultats

J’ai premièrement pu constater que la «Ramina» a eu en partie l’effet escompté c’est-à-dire qu’elle a effectivement freiné la contrebande. Cependant, ma recherche a aussi mis en lumière énormément de stratagèmes mis en place pour les contrebandiers afin de continuer ce commerce illégal malgré les interdictions. Je me suis également rendue compte de l’importance des situations économiques différentes de part et d’autre de la frontière sans qui, ce commerce n’aurait peut-être pas vu le jour. Deuxièmement, pour la question des frontaliers, mes recherches ont confirmé que l’économie tessinoise est totalement dépendante de ces travailleurs frontaliers. Cependant, il est vrai qu’il y a des effets secondaires de ces déplacements quotidiens au niveau écologique et la problématique du dumping salarial est réellement présente. Avec ces deux cas d’étude, la réponse à ma problématique est qu’il n’est pas nécessaire que la frontière soit matérialisée pour avoir une fonction de séparation. Il suffit à cette séparation d’être présente dans nos esprits.

Discussion

Aujourd’hui, la question des frontières est une question très controversée pour plusieurs raisons. D’abord, on voit ces dernières années une certaine augmentation du nationalisme et donc, par conséquent, une envie de certaines personnes de préciser et/ou de matérialiser ces frontières. Il faut être très prudent quant à la question, car un mur et une frontière n’ont pas le même rôle. Et malgré le fait que dans les dernières années, des murs ne cessent d’être construits, il est évident que nous sommes mondialement interconnectés. La pandémie actuelle illustre très bien cela. En effet, le virus n’a eu aucune difficulté à se répandre internationalement de par nos déplacements incessants. Ce travail permet donc d’illustrer le rôle des frontières dans le passé et aujourd’hui mais peut-être que ce serait bien que ce rôle évolue.

Conclusions

S’il est vrai que la matérialisation d’une frontière est très efficace pour séparer deux pays et populations, ce n’est pas le seul moyen. En effet, quelques problèmes tels que le dumping salarial suffisent pour que des mythes se créent et que les frontières se créent dans les esprits des gens. Ce phénomène est souvent suivi de tensions de part et d’autre de la frontière. De cette manière, la frontière se forme dans les esprits et il n’est pas nécessaire de la matérialiser pour séparer les peuples et créer des tensions. Les recherches que j’ai effectuées confirment ce point de vue. On peut voir que de nos jours, il n’y a plus de frontière matérielle entre la Lombardie et le Tessin mais la plupart des Tessinois voient d’un mauvais œil les travailleurs frontaliers alors que sans eux la machine économique tessinoise tournerait au ralenti ou ne tournerait pas du tout.

 

 

Appréciation de l’expert

Matthieu Bolay

Ce travail offre une analyse originale de la frontière italo-suisse sous l’angle des effets que sa matérialisation et sa dématérialisation a pu avoir sur l’économie régionale, les identités locales, et leurs politisation à différentes époques. Par l’analyse de sources variées (témoignages historiques, observations, entretiens d’expert-e-s, littérature secondaire), l’auteure problématise la notion de frontière et saisit les dimensions sociales et symboliques qu’implique sa matérialisation. Elle aborde ainsi avec tact les ambivalences de la frontière dans l’identité et l’économie régionale.

Mention:

bien

 

 

 

Collège Saint-Michel, Fribourg
Enseignante: Céline Schneuwly