Histoire | Géographie | Économie | Société

 

Aline Brenta, 2003 | Fribourg, FR

 

Mon travail d’histoire orale traite de la profession de conducteur de tram qu’exerçait mon arrière-grand-père. Avec mon arrière-grand-mère Jeanne, ils se sont occupés de ma mère, qui les a donc toujours considérés comme ses propres parents. J’ai donc voulu faire revivre les souvenirs de mes arrière-grands-parents en leur consacrant mon travail de maturité. Cela m’a permis de découvrir de nombreux aspects de leur vie ainsi que sur le passé de Fribourg. Au travers des livres ainsi que du témoignage de Jeanne, j’ai étudié différents aspects des tramways de Fribourg, dont leur apparition, leur fonctionnement, leurs usagers et le quotidien des employés.

Problématique

Avec ce travail, il s’agit de mieux comprendre le développement des tramways et de leurs successeurs dans la ville de Fribourg durant le 20ème siècle avec l’aide de mon arrière-grand-mère. Veuve de Charles, conducteur de tram, son récit me permet d’apporter une dimension subjective à un compte rendu historique de l’évolution des trams fribourgeois.

Méthodologie

L’histoire orale permet d’enrichir un évènement historique d’une dimension personnelle et ainsi de mettre en lumière certains aspects souvent délaissés par la littérature historique. Des témoignages oraux réalisés à partir d’entretiens créent une source historique à travers le récit de vie du témoin en question. Les propos tenus ici par l’interlocutrice sont subjectifs et dépendent de sa propre perception des évènements, ils doivent donc être confrontés à d’autres sources pour définir quels extraits du témoignage ont une valeur historique certaine.

Résultats

Dans un contexte d’essor économique, la Société des Tramways est créée le 12 janvier 1897 et la première ligne est ouverte le 29 juillet 1897. Pour répondre à la demande croissante, de nouveaux tronçons sont progressivement construits. Les trolleybus, d’abord utilisés parallèlement aux trams, les remplacent définitivement à partir du 31 mars 1965. Ce jour-là, Charles « est allé à la place Georges-Python, puis il a regardé un peu parce que le tram était garni. » Durant les années 70, les autobus diesel, très rapides à mettre en place, font leur arrivée, mais ils sont à nouveau remplacés par les trolleybus, plus écologiques, vers 1980. Les véhicules évoluent au cours des décennies, devenant de plus en plus confortables et spacieux. Au niveau tarifaire, les prix, d’abord fixés à 10 centimes, augmentent également graduellement. Des abonnements et des tarifs enfants sont par la suite introduits. Par ailleurs, le métier de Charles apporte certains avantages à sa famille : « Ils nous donnaient des cartes où il y avait 50 courses dessus. » Concernant les usagers, les trams sont prévus dans l’optique que toutes les classes sociales aient la possibilité de les utiliser. De nombreux étudiants et ouvriers empruntent ce moyen de transport pour se rendre à l’université et à l’usine. Jeanne, pour sa part, le prend régulièrement pour se rendre à son lieu d’apprentissage de couturière afin de gagner du temps. Charles accède au monde du tram grâce à « son parrain de confirmation qui avait écrit une lettre de recommandation pour qu’il puisse entrer aux trams. » Les relations semblent donc importantes pour accéder à différents postes de travail. Les journées de Charles sont longues et irrégulières. Sa famille doit donc s’adapter : « Si on devait dîner à deux heures, fallait faire le dîner pour deux heures. Puis, fallait faire avant pour [notre fils]. » Par ailleurs, « il avait un jour de congé. Mais, souvent, le dimanche, il travaillait. » Il semble donc difficile pour Charles d’allier son métier à une vie familiale comblée.

Discussion

Le récit de Jeanne apporte un témoignage indirect à mon travail. En effet, en tant qu’épouse, elle n’est pas informée de tous les détails du quotidien d’un conducteur de tram et n’a donc pu m’apporter qu’un regard externe. Cependant, son vécu a tout de même une valeur historique certaine et a toute sa place dans mon travail, car il apporte justement cette subjectivité propre au témoin qui vit un évènement à la fois de l’extérieur et en partie de l’intérieur.

Conclusions

En conclusion, les différents aspects des tramways fribourgeois sont enrichis d’un point de vue contemporain à l’époque qui donne un aperçu intime de cette période de l’histoire de la ville. Jeanne a occupé une position privilégiée pour observer les obstacles à une vie familiale comblée de son mari. Il aurait été intéressant de pouvoir croiser son vécu avec celui de Charles, afin d’avoir une vision encore plus précise du métier de conducteur.

 

 

Appréciation de l’expert

Christian Schiess

Ce projet de maturité présenté par Aline Brenta se situe au croisement de l’histoire urbaine et de l’histoire familiale. Par un entretien d’histoire orale mené avec son arrière-grand-mère Jeanne Peissard, dont l’époux Charles fut conducteur de tramways à Fribourg, la candidate propose une démarche originale qui s’inscrit pleinement dans la méthodologie qualitative des sciences sociales, tout en permettant de saisir certains aspects – souvent négligés par la littérature sur le développement des transports urbains – liés à l’articulation entre vie professionnelle et vie familiale.

Mention:

très bien

 

 

 

Kollegium St. Michael, Fribourg
Enseignante: Céline Grandjean-Marty